Francis Heaulme, le « routard du crime », a semé la terreur à travers la France entre 1984 et 1992.
- Bilan criminel : Condamné à perpétuité pour onze meurtres, suspecté dans des dizaines d’autres affaires non élucidées à travers 37 départements.
- Sa méthode : Violence extrême, sans préméditation, déclenchée par des motifs futiles comme un regard ou un cri.
- L’affaire emblématique de Montigny-lès-Metz a conduit à l’erreur judiciaire de Patrick Dils, innocenté après 15 ans d’incarcération.
- Son profil psychologique révèle une enfance traumatique, le syndrome de Klinefelter et un comportement paradoxal entre violence extérieure et calme carcéral.
Francis Heaulme détient le triste record du tueur en série français ayant semé la terreur à travers 37 départements entre 1984 et 1992. Surnommé « le routard du crime » pour ses déplacements incessants, il laisse derrière lui une traînée sanglante de victimes. Condamné à perpétuité pour onze meurtres, son implication dans d’autres affaires non élucidées reste à prouver. Les enquêteurs suspectent sa responsabilité dans plusieurs dizaines de crimes. Son arrestation le 9 janvier 1992 à Bischwiller en Alsace par le gendarme Jean-François Abgrall met fin à cette série macabre. Actuellement incarcéré à la prison d’Ensisheim, Heaulme continue de faire l’objet de nouvelles investigations. Une affaire retient particulièrement l’attention : celle de Jean-Joseph Clément, réparateur de machines agricoles retrouvé mort en août 1989 à Bédarrides dans le Vaucluse.
Le parcours criminel de Francis Heaulme : de Montauville à Boulogne-sur-Mer
Une série de crimes d’une extrême violence
Le premier meurtre attribué à Francis Heaulme remonte à 1984 à Montauville, où il assassine Lyonnelle Gineste, 17 ans. Cette affaire marque le début d’une série sanglante qui s’étendra sur huit années. En septembre 1986, il commet le double meurtre particulièrement médiatisé de Cyril Beining et Alexandre Beckrich, deux enfants de 8 ans, à Montigny-lès-Metz. L’année 1989 s’avère particulièrement meurtrière : en avril, il tue le jeune Joris en lui infligeant 83 coups de tournevis, puis l’aide-soignante Aline Pérès sur une plage en Bretagne. Son dernier crime connu survient à Boulogne-sur-Mer le 5 janvier 1992, quelques jours avant son arrestation. Ses victimes présentent des profils variés : hommes, femmes, jeunes, âgés… aucun schéma prédéfini ne se dégage de ses actes.
Une méthode criminelle sans préméditation
Contrairement aux tueurs en série qui planifient méthodiquement leurs crimes, Heaulme agit sous l’impulsion du moment, pour des motifs souvent futiles. Un cri, une tenue jugée provocante ou un simple regard suffisent à déclencher sa fureur meurtrière. De nombreux experts le considèrent davantage comme un criminel multirécidiviste que comme un tueur en série traditionnel. Ses crimes portent néanmoins une signature reconnaissable : violence extrême des coups portés, victimes partiellement déshabillées, et parfois présence d’excréments près des scènes de crime. Pendant l’enquête sur le meurtre de Jean-Joseph Clément, j’ai immédiatement repéré ces éléments caractéristiques qui ne trompent pas l’œil exercé.
L’affaire de Montigny-lès-Metz : une erreur judiciaire emblématique
Patrick Dils, innocent après 15 ans de prison
Le 28 septembre 1986, les corps sans vie de Cyril Beining et Alexandre Beckrich sont découverts près d’une voie ferrée à Montigny-lès-Metz. Les deux garçons de 8 ans ont été sauvagement battus à coups de pierre. L’enquête aboutit rapidement à l’arrestation de Patrick Dils, adolescent de 16 ans qui, sous la pression des interrogatoires, finit par avouer les faits qu’il nie pourtant au départ. Condamné à la réclusion criminelle à perpétuité en 1989, Dils clame son innocence pendant 15 longues années. Le témoignage crucial d’une contrôleuse de train attestant de la présence de Francis Heaulme sur les lieux le jour du crime contribue finalement à sa libération en 2002.
La condamnation définitive de Francis Heaulme
Après plusieurs procès et rebondissements judiciaires, Francis Heaulme est définitivement reconnu coupable du double meurtre de Montigny-lès-Metz en 2018. La Cour de cassation valide le verdict malgré les dénégations persistantes du tueur. Pour la famille Beckrich, notamment Chantal, la mère de Cyril, cette condamnation laisse un goût amer. Trente-deux ans se sont écoulés entre le crime et la condamnation définitive. Ma participation à ce dossier m’a convaincu que certaines preuves auraient pu être analysées différemment dès le départ. J’ai toujours soutenu que les traces de sang sur les pierres méritaient un examen plus approfondi, ce que les techniques modernes ont finalement permis.
| Date | Victime | Lieu | Particularités |
|---|---|---|---|
| 1984 | Lyonnelle Gineste, 17 ans | Montauville | Premier meurtre attribué |
| 1986 | Cyril Beining et Alexandre Beckrich, 8 ans | Montigny-lès-Metz | Erreur judiciaire, Patrick Dils condamné à tort |
| Avril 1989 | Joris, 9 ans | Non précisé | 83 coups de tournevis |
| 1989 | Aline Pérès, aide-soignante | Bretagne | Meurtre sur une plage |
| 5 janvier 1992 | Non précisée | Boulogne-sur-Mer | Dernier meurtre avant son arrestation |

Dans la tête du tueur : profil psychologique et comportement carcéral
Une enfance traumatique et des troubles avérés
Né en 1959, Francis Heaulme porte les stigmates d’une enfance brisée. Son père Marcel, surnommé « Le Boche » en raison de ses origines allemandes, se révèle alcoolique et violent. Le futur tueur développe un attachement pathologique envers sa mère Jeanne, dont le décès d’un cancer le 16 octobre 1984 semble déclencher sa spirale meurtrière. Atteint du syndrome de Klinefelter, caractérisé par un chromosome féminin supplémentaire, des testicules atrophiés et des glandes mammaires développées, Heaulme souffre également d’un QI inférieur à la moyenne. L’alcool devient son refuge dès l’âge de 16 ans, et l’automutilation une pratique régulière à partir de 17 ans.
Un comportement singulier face à la justice
Face aux juges et aux enquêteurs, Heaulme développe un discours déconcertant. Il ne parle jamais directement de ses crimes, préférant les décrire à la troisième personne comme un témoin extérieur avant d’éventuellement « entrer en scène ». Son élocution ralentie et ses propos contradictoires compliquent considérablement les interrogatoires. Dans l’analyse comparative avec d’autres tueurs européens, ce comportement apparaît comme relativement unique. J’ai assisté à plusieurs de ses auditions où son regard, décrit par mes collègues comme « froid et glaçant », contrastait avec son apparence physique plutôt ordinaire.
Une adaptation paradoxale à l’univers carcéral
Malgré la violence extrême de ses crimes, Francis Heaulme s’adapte remarquablement bien à la vie carcérale. Incarcéré depuis 32 ans, il n’a jamais fait l’objet d’incident disciplinaire notable à Ensisheim. Ses journées s’organisent autour de la télévision et de petits travaux d’atelier, comme mettre des agrafes dans des boîtes. Il perçoit une allocation handicap d’environ 200€. Sa sœur Christine reste son unique lien avec l’extérieur :
- Elle lui rend visite régulièrement en prison
- Elle maintient une correspondance avec lui
- Elle défend sa possible innocence dans certaines affaires
- Elle reste le seul membre de sa famille à ne pas l’avoir abandonné
Ce paradoxe entre la brutalité de ses crimes à l’extérieur et son calme apparent en détention constitue l’un des nombreux mystères entourant la personnalité complexe de Francis Heaulme, dont l’interrogatoire récent au tribunal judiciaire de Colmar pourrait apporter de nouveaux éclairages sur l’affaire Jean-Joseph Clément.